[My Rock'n'Roll] The Ramones - The Ramones
En 1976, alors que le rock était en train de sombrer dans le vide et l'ennui, une bande de renégats, dont ces quatre minables de Brooklyn, entreprirent de lui botter l'arrière-train et de le réveiller brutalement. Le punk-rock était à nouveau né, et ça continue encore aujourd'hui.
On peut débattre longtemps sur la paternité du mouvement punk, qui a inventé quoi, citer des noms glorieux du style Sonics, Kinks, Who, Velvet Underground, mais pour en arriver au brasier de 1977, il a bien fallu une étincelle.
Les Ramones sont quatre. Affublés du pseudonyme choisi par un Paul Mc Cartney à peine pubère, ils portent un véritable uniforme : jeans troués, blousons de cuir, Converse All-Star, cheveux au ras des sourcils. Quatre faux frères Dalton, quatre crétins new-yorkais, quatre désoeuvrés, punks, en un mot. Il y aura donc Joey, le longiligne et reptilien chanteur, Johnny, le nerveux et primitif guitariste, Dee-Dee le bassiste au beau visage de gouape, et Tommy, le sommaire batteur. Prêts pour affronter le monde entier à coups de power-chords sanglants et de slogans légèrement débiles.
On raconte beaucoup d'anecdotes sur eux. Le coup du verre de bière d'un Sex Pistol bu à moitié et rempli d'urine pour donner le change. Les bagarres. La dope. Le tapin, même, pour Dee Dee. La vieillesse difficile, soutiens à Bush, tant qu'on y est. Les morts tragiques, à un an et demi d'intervalle, des trois membres principaux.
Peu importe. Car il reste les disques. A commencer par le premier, dans lequel, forcément, tout est dit. Imaginons-nous en 1976. En ces années de plomb, le rock c'est Genesis, Emerson Lake & Palmer, les Eagles, tous ces groupes sclérosés dans leurs rêves de grandeur. Le Zeppelin de plomb qui devient aussi pathétique que les Rolling Stones. Oh certes, il y a déjà eu des banderilles, des ruades, ces disques de Dr. Feelgood, T-Rex, Bowie, quelques autres. Mais même Iggy n'est plus qu'un chanteur junkie oublié de tous.
Et arrivent les quatre intellectuels de Brooklyn, donc. Qui nous hurlent en 14 chansons, dont la plus longue dure 2 minutes et 38 secondes, qu'il faut sniffer de la colle, que Judy est une punk, que la petite amie du chanteur s'est faite enlever par les maniaques de Massacre à la Tronçonneuse. Rien ne sera plus pareil après.
Le premier album des Ramones constitue un évident manifeste pro-crétinisme. Les premiers mots du disque sont « Hey ho, let's go ! », ce qui leur constituera une doctrine solide pendant vingt-cinq ans de carrière. Les Ramones reprennent le « Let's Dance » de Chris Montez, niaise vignette pop de 1962, inventent un monde idéal conjuguant l'insouciance de leur enfance, la rage et la lose de leur vie d'adulte, nostalgiques mais pas passéistes. Les Ramones rêvent de Beach Boys, de filles à socquettes blanches, de vols dans les supermarchés, d'innocence.
Il faut préciser un point important : les Ramones ne savent absolument pas jouer. La batterie est plus que dépouillée, la guitare se contente de hacher les tympans de l'auditeur dans un blizzard sonore (qui voudrait rappeler le Wall Of Sound de Phil Spector), la basse se contente de jouer les toniques des accords, tandis que le chanteur et sa voix nasale ne ressemblent à rien de connu alors. Tout cela ensemble est évidemment prodigieux.
Car l'énergie de ce disque, qui ne connaît aucun répit, va tout envoyer en l'air. Désormais les Anglais se lanceront eux aussi dans l'aventure de la rage adolescente, on pourra voir débouler des Sex Pistols, des Clash, des Buzzcocks, bref, tout ce qui changea le rock'n'roll à partir de 1977. Et on ne compte pas recenser ici tous les groupes se réclamant de l'héritage ramonien, du skatecore de NoFX à la power-pop de Nada Surf, du grind-core le plus idiot au renouveau rock des Strokes, on ne peut tous les citer ici. Même U2 et les Red Hot Chili Peppers ont repris des titres de ce disque, c'est dire.
S'ensuivront une flopée de disques tous ou presque calqués sur le même modèle, les deuxième et troisième (Rocket To Russia et Road To Ruin) semblant les plus recommandables, une carrière riche en fans tous plus givrés les uns que les autres, jamais pathétique, toujours quelque part entre la folie pure et la décontraction la plus totale.
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