Ken le Survivant - Buronson / Tetsuo Hara
Ken le Survivant n'est malheureusement connue que pour sa version animée et son doublage humoristique en français. Mais derrière ce titre se cache un manga d'une sensibilité inconnue qui véhicule des valeurs nobles, de courage, de compassion, de sacrifice.
La série phare des années 80, Hokuto no ken, connue sous le nom de Ken le Survivant, fit partie de la vague manga qui déferla sur les chaînes de télévision françaises de l'époque. La série animée reste à ce jour une parfaite illustration des déboires du manga dans l'hexagone à ses débuts, en raison notamment d'une adaptation animée déplorable visuellement qui contraste avec le graphisme soigné du manga papier. Ce dernier demeure encore aujourd'hui une référence. La série tv « Ken le survivant » n'a pas été diffusée très longtemps sur les chaînes hertziennes. En effet, malgré une censure à la hache, Ken a continué de déranger car n'étant pas à l'origine destiné à un tout jeune public, il a très vite choqué les non-initiés, notamment l'association Famille de France. La société AB production achetait à l'époque les séries en gros et minimisait les budgets. Les équipes n'avaient alors que peu de temps, peu de moyen et surtout aucune connaissance de l'univers des mangas. Ken devient alors l'exemple même du doublage humoristique décalé de la version française.
Pourtant derrière ces muscles, ces « Ah-tatatata !!! » se cache une oeuvre d'une sensibilité méconnue qui véhicule des valeurs nobles, de courage, de compassion, de sacrifice. Sur un scénario de Buronson (Sanctuary, Heat) , mis en image par Tetsuo Hara (Cyber blue, Hang no Keiji ), on y découvre un monde en ruines en proie au chaos le plus total. Lors de la guerre nucléaire, tout a été ravagé, seuls les plus forts survivent dans ce nouvel ordre des choses. L'argent n'existe plus, il ne reste que la nourriture, l'essence et les esclaves comme monnaie d'échange. Au niveau du design comme dans le background, on ne peut s'empêcher de penser au film Mad max ; De vastes étendues désertiques, des ruines, une chaleur écrasante et pour fond sonore, le vrombissement mécanique des bolides appartenant au gangs qui brigandent avec violence tout ce qui se présente.
C'est dans cette atmosphère que Kenshiro fait son apparition. Héritier du Hokuto (art martial assassin basé sur la maîtrise des points vitaux), il ère dans ce monde à la recherche de la femme qu'il aime, Yuria, enlevée par Shin du Nanto Seiken. Ce dernier qu'il considérait comme un frère lui a infligé les célèbres cicatrices sur la poitrine en forme de grande ourse et, après l'avoir laissé pour mort a construit un empire.
Au cours de ses aventures, Ken croisera le chemin du meilleur comme du pire : bandits de grand chemin sans envergure, sans états d'âme et sans courage, Enfants victime d'un monde sans pitié, hommes perdus ayant sombré dans la folie, coeurs nobles se sacrifiant pour offrir l'espoir aux jeunes générations. Au fur et à mesure de ses rencontres, Kenshiro emplira son c½ur d'humanité et deviendra ainsi le digne successeur du Hokuto Shinken. On notera donc ses frères, Raoh, Toki et Jaggi qui furent également candidats à la succession du Hokuto et qui auraient du, selon la tradition, abandonner leur art à l'annonce du choix de l'hériter de la Grande Ourse. Ken croisera aussi le chemin des guerriers du Nanto, Shuh, Rei, Shin, Yuda et un dernier guerrier mystérieux protégé par les cinq étoiles filante.
Kenshiro, Héros par excellence qui fera face à un impitoyable destin.
Etalée sur vingt-sept tomes qui racontent deux époques, le manga fait évoluer ses personnages, les enfants deviennent adultes (les adultes ne vieillissent pas beaucoup par contre), les mentalités changent, l'organisation sociale se remet en place (pas toujours de la meilleure des façons).
Le réalisme du trait de Tetsuo Hara est contre-balancé par des énormités physiques (hommes de cinq mètres de haut pesant une tonne) qui sont vaguement justifiées (radiations nucléaires) et parfois des incohérences de perspectives dont on ne s'embarrasse pas trop. Mais le style graphique reste cohérent et évolutif (jusque dans les modèles architecturaux ou vestimentaires) permet à l'½uvre de rester dans un relatif réalisme.
Il ne faut en aucun cas s'arrêter à la version animée passée sur le club Dorothée. D'une part parce que la censure a tranché dans le vif, d'autre part parce que le doublage, s'il en a fait rire beaucoup, a ruiné le côté dramatique et épique de cette série. Car Ken le survivant, c'est avant tout une histoire de ligne de conduite, de chemin de vie. C'est l'histoire d'hommes qui, dans ce monde anarchique, ont chacun à leur manière décidé de la marche à suivre pour atteindre leur but (souvent l'amour d'ailleurs). Un concept original est introduit dans Hokuto no Ken, celui de meilleurs ennemis. Dans cette époque impitoyable, Kenshiro sera amené à combattre des personnalités fortes, des gens qui auraient pu être ses amis dans d'autres circonstances. Mais cette époque cruelle l'obligera à affronter ces personnes malgré la compassion.
Raoh, grand frère ennemi mais modèle malgré tout.
La série a connu par contre plusieurs polémiques autres que sa relative violence (je dit relative car étant destiné à un public averti, le manga n'est plus si choquant). L'½uvre a été taxée de fascisme à plusieurs reprises. En effet, outre les vêtements de cuir et certains uniformes très « typés », une image de l'anime a été censurée car on y voyait un drapeau avec une croix gammée. Ce malheureux malentendu (le sigle de la croix gammée signifie « myriade » en japonais) acheva de ternir la réputation du manga, à tort évidemment (les hommes portant les uniformes douteux sont justement le symbole de ce que critique l'auteur à savoir la croyance d'une race supérieure).
La version française du manga qui fut éditée par « J'ai lu-Bd » est malheureusement de bien piètre qualité. Papier trop fin et jaunâtre, impression parfois (souvent ?) mal calée, mise en page moyenne. Malgré tout, Ken le Survivant demeure une oeuvre incontournable pour toute personne s'intéressant de près ou de loin aux mangas des années 80. Cependant il est malheureusement assez difficile à trouver. Il ne reste donc qu'à espérer une réédition comme celle de City hunter ou se rabattre sur la « suite » Ken Fist of the Blue Sky qui raconte les aventure d'un héritier du Hokuto dans les années 30.
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