Good Night, And Good Luck de George Clooney
Avec David Strathairn, George Clooney, Robert Downey Jr... (2005)
George Clooney n'est pas qu'un des acteurs les plus charismatiques d'Hollywood, c'est aussi un réalisateur pertinent et engagé, preuve en est cette recréation patiente du maccarthysme.
Acteur parmi les plus passionnants à l'heure actuelle, George Clooney s'affirme aussi comme un réalisateur plus qu'intéressant. Après un sympathique Confession D'Un Homme Dangereux, il revient avec ce Good Night, And Good Luck qui ne va sûrement pas arranger son image de trublion hollywoodien.
Dans ce deuxième film, on découvre, reconstitution minutieuse à l'appui, la guerre médiatique ayant opposé un courageux journaliste de CBS, Ed Murrow (David Strathairn, d'une dignité remarquable), au terrible sénateur anti-communiste, Joseph Mc Carthy. Aidé de son équipe, Murrow rejettera toutes les intimidations pour affronter celui qui rend l'Amérique de plus en plus paranoïaque.
On le sait, Clooney s'est publiquement opposé à la politique de George W. Bush. Ce film, en première lecture, va exactement dans ce sens. Murrow déclare en substance : « on ne peut pas combattre pour la liberté dans les autres pays si on ne la respecte pas dans le nôtre ». Voilà, qui, à l'heure du Patriot Act et de l'intervention en Irak, résonne particulièrement à nos oreilles. Good Night, And Good Luck (la phrase que lance Murrow à la fin de chaque émission) nous fait donc le portrait, vu avec recul par des journalistes lucides, d'une Amérique en proie à ses démons, inquisitrice et hystérique. Prenant des risques certains, Clooney n'utilise que des images d'époques pour montrer Mc Carthy, ce qui renforce encore plus la force de son propos. On frémit littéralement devant le discours délirant du sénateur, qui voit des communistes partout, et particulièrement chez ceux qui osent s'opposer à lui.
Cependant, il est possible, en se souvenant du premier film de Clooney, d'avoir une deuxième lecture, bien plus personnelle du film. Le père de l'acteur-réalisateur était journaliste, sa tante chanteuse à la télévision, et on sent qu'il s'agit là d'un sujet plus qu'intime pour l'ancien docteur Ross. La conclusion du film est ainsi très claire : il s'agit d'une part d'une ode à un journalisme intègre, pugnace et moral, et d'autre part d'un plaidoyer pour une télévision (voire des médias dans leur globalité) à vocation éducative, destiné à élever le peuple plutôt qu'à le laisser se complaire dans sa misère intellectuelle. Ce discours, finalement très peu courant dans le cinéma américain, est livré avec pudeur et tact dans la dernière scène du film. Et, finalement, il est au moins aussi fort que le message virulent contre l'administration Bush.
Reconnaît-on un auteur au fait qu'il ressasse sans cesse les mêmes thèmes ? Toujours est-il que Clooney, comme dans son premier film, s'attache à recréer une époque qu'il n'a pas connue (il est né en 1961, le film se déroule en 1953), avec une grande tendresse. Des intermèdes jazzy d'une extrême douceur, chantés par Dianne Reeves, viennent nous rappeler l'ambiance de ces années 50 au cours desquelles l'Amérique se réinventait littéralement. La reconstitution est dépouillée, dans un doux noir et blanc, le budget visiblement limité poussant l'entreprise à rester modeste. Les acteurs, fort talentueux (en plus de Strathairn et Clooney, on signalera Robert Downey Jr, Frank Langella ou Patricia Clarkson, tous remarquables) jouent avec dignité et sobriété. On se prend à partager leurs émois en regardant des bandes vidéos de l'époque, tellement parlantes au spectateur d'aujourd'hui.
Au final, la principale conviction qui nous se sera créée à la vision de ce film, c'est que ce farfelu de George Clooney est bien plus qu'un bellâtre un peu rigolard. On s'en doutait évidemment, au vu de sa carrière anticonformiste, mais, en livrant un tel film, modeste, dépouillé, virulent, il nous prouve de façon éclatante qu'il est en plus un réalisateur intelligent et attachant. Cet homme aurait-il tous les talents ?
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