Qu’est-ce que le sport…

La question peut faire sourire, mais en réalité, donner une définition du sport n'est pas une tâche facile. Courir derrière son labrador le dimanche matin en hiver, outre le fait que ce soit un excellent moyen de se faire un claquage, est une activité physique. Donc un sport ? Pas vraiment... « Etre du sport » nécessite de respecter certaines définitions.

Le sport n'est pas vraiment une activité humaine comme les autres. Elle est tout à fait spécifique, comme peuvent l'être les arts. En effet, le sport ne remplit (au départ) pas de fonction primaire comme la reproduction ou la survie de l'individu/de l'espèce. L'étymologie du mot « sport » est à ce titre tout à fait représentative puisqu'il avait le sens de « loisir » au sens général avant de ne désigner que les activités physiques de loisir.

Cependant, la définition du sport ne s'arrête pas à la seule étymologie du vocable. Toute activité physique ne pouvant pas être considérée comme sportive. La contribution du physique à la réalisation de l'activité sportive n'est qu'une part de cette action : les règles, la notion de compétition, de rencontre, et des valeurs attachées à l'activité sont tout aussi importantes que la simple dépense énergétique.

Ainsi, la base de l'activité sportive est celle du jeu. Le sport est avant tout une activité ludique qui fait appel à des instincts fondamentaux tels que les a défini Roger Caillois. Ces instincts du jeu présidant à l'apparition des pratiques sportives sont au nombre de quatre : deux catégories de jeu traditionnelles, qui sont de moins en moins prégnantes dans le monde moderne, et deux autres catégories qui sont essentielles au sport d'aujourd'hui.

Olympie, le berceau du sport moderne

Olympie, le berceau du sport moderne

Les jeux traditionnels sont appelés "Mimicry" et "Ilinx" : le premier renvoie au déguisement, au fait de devenir quelqu'un d'autre, le deuxième, du grec ilingos, signifie le vertige.

Aujourd'hui, ce sont les deux autres catégories qui priment dans notre définition du sport :

  • "l'Agon", ou la lutte, est l'instinct de compétition, de volonté de dominer l'adversaire sans le blesser.
  • "l'Alea", ou le hasard, signifie le besoin d'activités dont l'issue est incertaine, non décidée par les seules qualités de chaque compétiteur.

Ces catégories de jeux ne sont pas des simples concepts antiques, mais elles sont à l'origine de ce qui fait le sport. Ainsi, elles expliquent pourquoi le sport prône certaines valeurs. Le dépassement de soi est lié à "l'Ilinx", tandis que l'équité sportive (symbolisée par exemple par l'olympisme ou une compétition comme la Coupe de France ou chaque club, amateur comme professionnel, peut accéder à la victoire) est directement issue de "l'Alea". Le sport s'inscrit dans ces structures de jeu. Comme la compétition, qui est voulue universelle car les règles qui l'entourent deviennent les mêmes pour tous. Sans cet aspect de réglementation et d'universalité, l'activité ne peut être considérée comme sportive. Voilà pourquoi les Jeux Olympiques sont (ou plutôt étaient...) réservés aux amateurs qui ne vivent pas de leur sport. Voilà aussi pourquoi le cours de Yoga ou l'ascension du Mont Blanc ne peuvent être considérés comme des activités sportives, alors qu'un match de Curling au fin fond de la Suède du Nord l'est...

Puisqu'on vous dit que c'est du sport!

Puisqu'on vous dit que c'est du sport!

Mais le cours de Yoga n'est pas le seul à pouvoir se faire exclure de cette définition de l'activité sportive. A bien y regarder, la professionnalisation, la modernisation des plus grands sports, les fait de plus en plus glisser hors du champ sportif. Par exemple, l'une des compétitions les plus emblématiques du sport professionnel, peut-être la plus « belle » des compétitions sportives au monde, la Champions League, la coupe d'Europe des clubs la plus prestigieuse. Du sport ? Alors que la formule de cette compétition cherche volontairement à bannir le hasard afin de retrouver les meilleurs clubs à la fin grâce à un système de qualification favorisant les grands championnats et un format visant à éviter les surprises. Certes, la Champions League respecte "l'Agon" car elle reste une compétition. Mais parce qu'elle va à l'opposé de "l'Alea", et même de "l'Ilinx" (où est le dépassement de soi si ce n'est de la part des « petits » clubs ?), elle correspond de moins en moins à la définition du sport.

Il n'est pas ici question de juger les compétitions qui, telle la Champions League, s'écartent du sportif. Car dans ce cas, il faudrait juger tout sport professionnel (le sport devant être un plaisir, et non un métier), et par là même, l'évolution des Jeux Olympiques qui acceptent le professionnalisme pour certains sports -le basket par exemple- et le refusent pour d'autres -le football dans une certaine mesure, le rugby... Mais il y a comme un paradoxe en Europe, où l'on se plaît à critiquer les « sports » américains. Des sports US qui se considèrent plus comme des shows que des compétitions sportives, alors que les compétitions européennes tendent de plus en plus vers les mêmes pratiques, sans pour autant toujours l'assumer.

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