The Raconteurs - Broken Boy Soldiers

Que fait Jack White quand il est en vacances ? Il monte un nouveau groupe avec Brendan Benson et part à l'abordage du rock moderne.

la pochette du disqueJack White apparaît aujourd'hui comme une figure tutélaire et incontournable du petit monde du rock'n'roll. Le surdoué leader des White Stripes, sans doute conscient des limites de son duo, a donc décidé, avec l'aide du songwriter Brendan Benson et de la section rythmique des talentueux Greenhornes de Detroit, de s'offrir une petite récréation et de créer les Raconteurs.

Ce qui est frappant, avant même l'écoute du moindre titre du groupe, c'est le sentiment très premier degré qui domine en parlant des Raconteurs, quand on connaît leur histoire. Il ne s'agit ici que d'écrire des chansons, et de s'amuser en les jouant et en les enregistrant dans une ferme au milieu de nulle part. A priori, pas de calcul, pas de pose, pas de concept rouge et blanc, non, juste des chansons, si possible bonnes. On avait été frappé, d'ailleurs, par le single « Steady As She Goes » : trois accords, un riff, des paroles désarmantes (« trouve toi une copine, installe-toi et mène une vie simple dans une ville calme, reste calme quand elle s'en va », ce genre), des harmonies vocales limpides, bref, un titre imparable, évoquant aussi bien les Pixies que les Who, et en même temps, grâce à cette voix de chat de gouttière, portant la griffe indéniable de Jack White. Comme si les White Stripes étaient quatre, en fait.

Mais loin de se reposer sur une aussi évidente réussite, le groupe a su explorer d'autres territoires pour construire son album. Divers noms nous reviennent en mémoire, en plus de ceux déjà cités, Led Zeppelin (sur « Broken Boy Soldier » ou « Level »), Beatles (sur « Intimate Secretary » ou « Call It A Day »), Small Faces (sur « Store Bought Bones »), ou la soul façon Stax (« Blue Veins »), nous offrant un disque très varié, voire un peu tortueux. Quelques titres relèvent véritablement d'un très haut niveau, comme le très doux « Together » (entre Sparklehorse et Phoenix) ou le déglingué et lumineux « Yellow Sun » (évoquant toute la pop 60's, anglaise ou américaine), même si, en dehors du fulgurant « Steady As She Goes » (judicieusement placé en ouverture), il est difficile de dégager des titres.

le clip réalisé par Jim JarmuschOn l'aura évidemment compris, ce disque aurait largement pu sortir en 1973. Jack White, déjà fréquemment traité de passéiste, a trouvé avec Brendan Benson un compère dont le compteur temporel est bloqué au moins aussi loin que le sien. Guitare fuzzy, basse caoutchouteuse, orgue Hammond, il ne manque plus que les craquements du vinyle pour qu'on y croie. Mais, étonnamment, cela n'est absolument pas choquant. Car depuis 5 ou 6 ans, le rock n'est que recyclage, ou presque. Et, ici, c'est fait avec une sincérité évidente. Il n'est pas question de mode ou de copie dans Broken Boy Soldiers, c'est juste l'oeuvre d'une bande de potes qui rêvent de faire un chouette disque qu'on pourra ranger avec les classiques du rock'n'roll, sans prétention aucune.

Et après tout, c'est l'essentiel. Malgré un premier abord décevant, à cause autant du manque d'originalité que de la complexité des chansons, on passe du bon temps à écouter ce disque, confortable comme une vieille paire de pantoufles élimées, on se surprend à vouloir réécouter quelques vieilleries proches dans l'esprit (on pense ici aux époustouflants Big Star, responsables entre 1972 et 1974 de trois albums colossaux, que l'on recommande chaudement), et à désirer que ces Raconteurs continuent leur pastorale aventure.

Site officiel : http://www.theraconteurs.com/ (deux morceaux en écoute)

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