Mirromask de Dave Mackean et Neil Gaiman

Sortie en DVD: 3 octobre 2006

Mirrormask est un conte fantastique qui possède, dans son histoire et ses concepteurs, tous les ingrédients d'une féérie éblouissante. Encore faut-il que la sauce ne soit pas trop indigeste. Qu'en estil réellement ?

afficheMirrormask peut être une énigme. Comment un projet réunissant parmi les meilleurs artistes anglais a-t-il pu se retrouver ignoré des distributeurs en salle, pour nous arriver directement en DVD ? L’équipe rassemblée pour un pari esthétique aussi osé aurait mérité une présence sur grand écran, alors qu’en fait, même son arrivée sur support numérique a été discrète. Il est naturel de vouloir lui accorder un peu plus de place.

Helena subit la vie ingrate dans le cirque de ses parents où elle est jongleuse. Son seul loisir qui lui apporte du réconfort sont les histoires qu’elle se raconte et les dessins qu’elle réalise et tapissent sa chambre. Après une violente dispute sa mère va tomber gravement malade, et le cirque menacé. Hébergée dans un vieil immeuble chez sa tante, elle va se retrouver propulsée dans un univers onirique.

Voici une oeuvre un peu singulière dans sa conception. Dave McKean est un dessinateur reconnu du milieu des comics, au graphisme élaboré composé de multiples techniques mélangées (gouache, collages, …). Neil Gaiman a été le scénariste du précédent d’une série de grande qualité, Sandman (le dossier Comics disponible sur le site le confirmera), mais est aussi un écrivain SF / Fantastique talentueux, déjà récompensé d’un prix Hugo avec American Gods. Quand ces deux personnes décident ensemble de réaliser un film, ils vont naturellement choisir un studio pour les épauler qui saura le mieux traduire leur créativité. Il s'agit du Jim Henson Company, créée par le fondateur du célèbre Muppet Show, mais aussi du tout du même sympathique Fraggle Rock, et surtout de deux perles au cinéma, Labyrinth et le phénoménal Dark Crystal.

Avec ce trio on peut s'attendre à un feu d'artifice visuel étonnant, à un symbiose parfaite pour illustrer un conte de fées. Très rapidement, lorsque l'univers parallèle fait son apparition, nos attentes sont comblées. L'héroïne, qui rappelle aisément la Alice de Lewis Caroll, se trouve propulsée dans une intrigue construite, dont l'écho à sa vie réelle pour créer la confusion est assez bien menée. Les images elles imposent définitivement le style graphique de Dave McKean. Les filtres composent les peintures qui colorent l'ambiance, sur laquelle les décors, inspirés des dessins de la jeune Helena (et par extension, le trait caractéristique de McKean) sont autant de collages comme on en retrouve dans les livres du dessinateurs. Les animations assurées par le Jim Henson Workshop s'intègrent à la demande dans l'imaginaire des deux premiers compères. Il y a peut être un surplus d'effet numériques qui montrent qu'ils suivent bien entendu les progrès de la technique des effets spéciaux, aux dépends en partie du travail sur les marionnettes et leur coté plus intimiste.

Helena et la reine de lumière

Pourtant la magie tant attendue n'a pas opérée. La faute tout d'abord sans doute à une narration qui trop souvent ressemble seulement à un prétexte pour passer d'un tableau à un autre sans lien entre eux, tout aussi jolis soient-ils. Le monde et son ambiance particulière ont le malheur d'être tout simplement vide et sans âme. On pourrait par moment comprendre cet aspect, notamment le fait qu'il est une sorte d'interprétation d'un univers en deux dimensions, plat, et le plaisir manifeste de Helena de se retrouver ici, alors qu'elle recherchait une certaine banalité en voulant fuir le cirque. Ce qui rendrait superflu les quelques rencontres avec des personnage véritablement atypiques. Enfin si l'intrigue est digne des capacité d'écriture de Neil Gaiman, elle donne l'impression d'être une adaptation simpliste de ce qui a fait la renommé de l'écrivain. Après avoir lu une oeuvre aussi passionnante que Neverwhere, il est difficile de ne pas reconnaître le lien de parenté. Libéré des contraintes de durées, le roman ne se contente pas de résumer les envies de l'auteur. Le film, lui, ne veut (ne peut ?) pas se permettre de tirer en longueur, et nous livre une histoire dont le dénouement final est assez décevant.

l'arrivée

Le premier essai sur grand écran de Dave McKean et Neil Gaiman n'est pas très concluant. L'intention de faire un feu d'artifice visuel est bien présent, et c'est encourageant. Mais le film manque cruellement d'âme pour le trouver attachant, voire sensible. La comparaison pourrait faiclement être fait au cinéma avec The Cell de Tarsem Singh, fascinant visuellement, sans être transcendant. Il peut cependant servir de très bonne introduction pour découvrir tous les talents qui ont collaboré, et ensuite se diriger vers leurs oeuvres, infiniment plus abouties. Pour les plus patients, Henry Selick, le réalisateur complice de Tim Burton pour L'étrange Noël de Mr. Jack va s'attaquer à une adaptation d'un roman de Gaiman, Coraline, prévu pour Août 2007. Le projet est tout aussi prometteur et méritera d'être suivi. Deux autres films reprendront ses romans dans l'année à venir, Stardust (dont l'histoire proche d'un conte anglais et aussi du Brigadoon de Vincent Minelli) et Books of magic. La même filmographie signale d'ailleurs l'existence d'une mini-série qui est à l'origine du roman Neverwhere adapté du scénario.

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