Primal Scream - Riot City Blues

Nouvel album pour les désormais vétérans de Glasgow, chantres depuis toujours d'un rock dansant et engagé.

la pochetteDepuis plus de vingt ans, Primal Scream n'a cessé de se renouveler : de groupe pop byrdsien à ses débuts, à grand prophète post-industriel à l'aube des années 2000, en passant par machine à danser, le projet mené par Bobby Gillespie a sans cesse dérouté son monde. Qu'en est-il de ce Riot City Blues de 2006, alors que les banderilles des jeunes groupes bien habillés secouent le petit monde du rock ?

D'entrée, il faut le préciser, Gillespie est revenu à ses sources, ce qui tombe bien à l'heure des Yeah Yeah Yeahs et des White Stripes : le rock, si possible garage, voire psychédélique. Mais orné d'une rythmique dansante voire funky. Après un XTRMNTR apocalyptique, un Evil Heat craspec qui lorgnait du côté de Death In Vegas, Primal Scream, se remémorant son album Give Out But Don't Give Up, revient carrément aux Stones de « Honky Tonk Women » dès l'excellent premier titre. Cite le « Shake Some Action » des Flamin' Groovies dès le deuxième. Lance des « allright » dignes d'Iggy Pop dans le troisième. Vole un titre aux Moving Sidewalks (obscur combo garage 60's dont faisait partie Billy Gibbons de ZZ Top). Etc.

Grand disque copier-coller ? Pas vraiment. On ne peut nier que Gillespie a un style bien à lui, en partie grâce à sa voix légèrement nasale omniprésente tout au long du disque. Intenable, il remplit l'espace, susurre, hurle, bondit partout. Même s'il s'agit d'un groupe (dont fait partie Mani, l'ancien bassiste des Stone Roses), Primal Scream est devenu une machine à ego, entièrement au service de son leader. D'où un côté un peu épuisant : 48 minutes avec un Ecossais ancien junkie et surexcité, ça fatigue. Pas de répit dans ce disque, difficile de l'écouter d'une traite.

Ensuite, le son ? On se retrouve dans une situation un peu paradoxale : alors qu'il a, en tant que batteur de Jesus & Mary Chain, en grande partie inventé le mouvement shoegazer, Gillespie revient aux sources et, cruellement, sonne comme ceux qu'il a inspirés : Brian Jonestown Massacre, Dandy Warhols et surtout, Black Rebel Motorcycle Club (en particulier le dernier album de ceux-ci). On pourrait disserter de longues heures sur l'état du rock actuel, sur le fait qu'un groupe de vingt ans d'âge se trouve totalement dans le propos d'aujourd'hui en revenant à ses sources (ce qui voudrait dire qu'on tourne en rond, en gros), toujours est-il que cette similitude sonore est... troublante.

Primal Scream entend donc synthétiser, disons, 40 ans de musique rock : Rolling Stones omniprésents (en dehors de la chanson d'ouverture, « Hell's Comin' Down » est frappant), feulements garage punk, clins d'oeil velveto-stoogiens (« Little Death », rien que le titre), rythmiques techno-boogie, avec harmonica, tout le monde trouvera ce qu'il souhaite dans ce disque fourre-tout. Au milieu de ces chansons extrêmement rock et souvent bonnes, Primal Scream emporte la mise avec deux morceaux plus calmes, « Sometimes I Feel So Lonely » et son intro springsteenienne et son refrain pop-soul, et le stonien (période « Moonlight Mile ») « To Live Is To Fly ». Deux morceaux, certes chargés d'un point de vue sonore, mais humbles et paisibles.

Ce sont ces deux morceaux qui empêchent Primal Scream de sonner définitivement comme des suiveurs des Dandy Warhols et nous rappellent que ce groupe a, depuis ses débuts, décidé de ne laisser aucun répit, de ne faire aucun compromis. Un groupe d'une honnêteté rare, certes un peu naïf. On ne peut nier à Gillespie le fait de vouloir faire vivre la musique qu'il aime, d'ouvrir des portes, de rêver d'un disque parfait qui synthétiserait tous ceux qu'il a aimés jusque là. Reste un assez bon disque, peut-être trop référencé, peut-être trop chargé, peut-être pas assez mélodique, mais indéniablement homogène, rempli d'énergie, et, surtout, totalement sincère.

Réactions


Personne n'a encore réagi. Soyez le premier.